Viens, viens que nous allions ensemble pendant cet après-midi de printemps, viens qu’on s’envole six pieds sous terre et qu’on reparte en arrière, viens qu’on s’écroule vers l’infini de l’Espace, viens, qu’avec tendresse, on rage, viens qu’on oublie de se rappeler, viens qu’on se rappelle d’oublier, viens qu’on joue le sérieux, viens qu’on aime leur haine d’envieux, qu’on se laisse prendre au filet du temps qui libère, qu’on se rebelle contre la hiérarchie, contre le vent, – mais attention poliment ! -, qu’on s’ignore pour se reconnaître, qu’on s’engouffre en un faufilement, qu’on se prenne au défi de se cacher derrière nous-mêmes, qu’on se surprenne avec prévisibilité, qu’on s’étouffe de rire, viens qu’on aille danser sous le soleil, sous la pluie, sous la nuit comme sous la lumière, viens qu’on se mette à chanter comme des gosses, plutôt que des notes, des cris, viens qu’on décide tous les deux d’un nouveau monde, d’une nouvelle ère, briquetée d’ancienneté, viens qu’on commence une fin d’un quelque chose rien qu’à nous, viens qu’on les abandonne tous dans l’emportement, les lâches, les méchants, les bons, les riches, les miséreux, viens qu’on s’enfuie loin d’ici, tout près, loin d’eux tous, juste à côté, loin de ce qu’ils veulent et ne veulent pas, loin de leur dieux, à deux pas, viens qu’on soit libres de brûler les prisons, viens qu’on soit forts de rester faibles, viens qu’on se tue à l’effort de ne rien faire, viens qu’on se pense beaux de laideur, viens qu’on se fasse beaux de laideur, viens qu’on morde la vie comme elle déchire les gens, viens qu’on vienne, tout simplement, viens qu’on soit toujours là, toi pour moi, et moi pour toi, et l’inverse aussi pourquoi pas, viens qu’on prie le blasphème, viens qu’on détruise la création, viens qu’on redessine l’existence à coup de gommes, quelque chose d’inédit que tout le monde a déjà vu pour deux êtres torturés mais sans soucis, viens qu’on rêve le réel, viens qu’on ose la peur, viens qu’on se déchaîne de douceur, viens qu’on se défoule d’affection, viens qu’on se pose en tourbillon, viens qu’on se tienne la main sans répulsion, qu’ils se récrient s’ils peuvent, viens qu’on s’embrasse, qu’on se gifle, viens qu’on meure, viens qu’on vive, viens qu’on leur dise à tous, qu’on leur dise pas surtout, qu’on s’en fout d’être blanc, noir ou rouge.”

Un texte signé Nila (14 ans), écrit en atelier d’écriture (en distanciel) durant le confinement d’avril 2021 et mis en ligne avec l’autorisation de l’auteur.

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